1960 -1970 : Le Mouvement dans les Vosges : dynamisme et ouverture

Lun18Déc202309:41

1960 -1970 : Le Mouvement dans les Vosges : dynamisme et ouverture

Deux décennies racontées par Roland Daval, ancien permanent régional et ancien délégué général

 

En guise d’introduction - rappel historique :

 

C’est en 1964 que sont créés les Éclaireuses et Éclaireurs de France (EEDF) issus de la fusion des Éclaireurs de France (EDF), des Éclaireurs Français – deux associations de scoutisme laïque créées en 1911 et ouvertes aux filles et aux garçons depuis 1947, et de la section « neutre » de la Fédération Française des Éclaireuses (FFE).

En 1966, les EEDF fêtent leur 2ème anniversaire en organisation à Montgeron, en région parisienne, le Congrès de l’an 2.

A cette occasion, Jean NATY BOYER, qui a créé nombre de chansons pour les éclaireurs, écrit le chant du Congrès : L’oiseau Tchac Tchac. Dans cette introduction d’un article qui retrace le passé, nous reprenons les paroles du 1er couplet : « On dit que le temps qui passe / jamais ne revient. / Quand même il reste une trace de ce qui fut bien ».

 

Des groupes EEDF et une équipe départementale dynamiques :

 

Dans les années 1960 – 1980 le département des Vosges compte un bon nombre de groupes locaux riches dans leurs effectifs d’accueil d’enfants et de jeunes.

  • Remiremont : un groupe issu de la FFE.
  • Épinal : un groupe implanté dans le quartier de la Vierge puis sur le territoire de la nouvelle ZUP.
  • Mirecourt : un groupe porté par l’Ecole normale d’instituteurs dont nous allons reparler spécifiquement.
  • Gérardmer : le groupe est installé au lycée climatique.
  • Le Thillot : un groupe qui fonctionnait déjà depuis de nombreuses années et qui connaît une nouvelle dynamique.
  • Neufchâteau : le groupe anime également un centre aéré dont nous parlerons plus loin.
  • Saint-Dié : un groupe avec un clan dynamique qui a créé un groupe folklorique indépendant – La Soyotte – qui va rayonner pendant de nombreuses années dans la région.
  • Des groupes plus récemment créés : Saint-Etienne les Remiremont, Golbey, Uxegney, Thaon les Vosges, Marzelay, Chatenois.
  • Un clan à Bains les Bains.
  • Des tentatives à Raon l’Étape, à La Bresse, à Cornimont.

Une équipe départementale bien structurée porte et accompagne cette dynamique, assure la promotion du mouvement et développe des activités de formation, week-ends et stages techniques (notamment activités de plein air).

A titre d’exemple pour contribuer à faire connaître l’association, en mars 1971 une tournée de récitals : « La guitare à travers les siècles » avec l’auteur / compositeur et guitariste Blas SANCHEZ. Blas SANCHEZ a écrit lui aussi de nombreuses chansons pour les EEDF et c’est l’occasion d’organiser au CEG du Thillot un week-end chansons et guitare.

Les EEDF sont aussi très impliqués dans la vie associative du département. A titre d’exemple, avec le soutien de la Direction Départementale Jeunesse et Sports, ils contribuent avec d’autres associations à la création et à l’animation du Groupement des Animateurs Vosgiens (GRANIVO). Le GRANIVO, s’appuyant sur les compétences des associations et souhaitant répondre au mieux à leurs besoins, organisent de nombreux week-ends et soirées de formation : activités culturelles, activités de plein air, vie associative, …

 

Un groupe particulier – le groupe de Mirecourt :

L’Ecole normale d’instituteurs des Vosges est implantée alors à Mirecourt et les Éclaireuses et Éclaireurs de France comme les Francs et Franches Camarades y ont une large place dans la vie en internat. En effet, on entrait à l’école normale à l’âge de 15 ou 16 ans, en seconde, pour y passer quatre années.

Un tiers des élèves instituteurs vivent pendant 4 ans une aventure dans le scoutisme et, pour certains, vont poursuivre leur engagement.

Les EEDF étant mixtes, le groupe accueille des filles du lycée de filles.

Le clan – le clan du Gui Sacré (lieu-dit d’une forêt proche où se déroulait chaque année une soirée d’accueil des nouveaux membres), qui regroupe les ainés mais dans lequel sont également présents les responsables d’unités, est particulièrement important et accueille une cinquantaine de personnes.

Ouvert sur la ville, le groupe anime des unités louveteaux, éclaireuses et éclaireurs et des jeunes viennent au clan et/ou s’engagent comme responsables.

Une unité extension fonctionne à l’Institut Médico Pédagogique de l’hôpital psychiatrique départemental de Ravenel.

A ces plus forts moments, le groupe compte jusqu’à plus de 300 membres.

Il faut aussi souligner que le clan anime une équipe de marionnettistes qui intervient tout au long de l’année dans de nombreuses écoles du département et, pendant l’été, dans les colonies de vacances. Scénarios, marionnettes en feutrine, tout est imaginé et fabriqué par le clan.

 

Les EEDF – association complémentaire de l’école :

 

Depuis les années 1947, les E.DF. sont considérés comme une association complémentaire de l’école et bénéficie de la présence d’animateurs permanents, instituteurs mis à disposition.

Dans les Vosges, grâce à la grande proximité avec l’école, dynamique issue de l’école normale de Mirecourt, l’inspection académique met à disposition un instituteur qui exerce les fonctions d’animateur régional pour la région EEDF Alsace – Lorraine.

La permanence régionale est alors implantée à Épinal dans l’ancienne école de la rue Lormont.

Dans cette proximité avec l’école, pendant plusieurs années, avec l’Office Central de Coopération à l’Ecole (OCCE), l’Institut Coopératif de l’Ecole Moderne (ICEM – mouvement Freinet) et les Francs et Franches Camarades (FFC), les EEDF organisent et animent un stage qui s’inscrit dans la formation continue des enseignants, stage portant sur la classe coopérative et étant vécu dans une démarche coopérative.

 

Des activités ouvertes à tous – le service vacances :

 

Dans cette dynamique, l’équipe départementale EEDF des Vosges décide d’ouvrir plus largement le scoutisme à tous pendant le temps des vacances. Toutes ces activités vont pouvoir se développer grâce à un soutien financier important en matière d’équipement et de travaux de la Caisse d’Allocations Familiales des Vosges.

 

Le camp pilote de Soulosse :

En 1966, l’équipe départementale crée à Soulosse sous Saint Elophe, petit village de la plaine des Vosges non loin de Neufchâteau.

Le camp pilote est avant tout destiné à accueillir des jeunes clans sans encadrement pour un camp d’été ou sans moyens matériels suffisants, on y accueille des jeunes non EEDF qui vont venir ainsi découvrir le scoutisme à travers un temps fort qui marquera pour la vie.

Des jeunes, placés tout au long de l’année en établissements viennent également vivre un séjour de vacances avec les autres.

Pendant de nombreuses années, des séjours franco-allemands seront également organisés.

Dès 1969, le camp est ouvert les deux mois d’été – juillet et août, on y vient quand on veut et pour le temps que l’on veut. Tout au long de l’été ce sont 150 à 200 jeunes qui sont accueillis.

Si le village offre un lieu d’accueil favorable à des activités d’été pour des adolescents, c’est avant tout un riche site archéologique qui va permettre de donner une activité phare. C’est en effet le lieu d’une ancienne garnison romaine sur la voie romaine de Lyon à Trèves et non loin de la cité gallo-romaine de Grand. Dès la première année de fonctionnement, les fouilles d’une villa gallo-romaine vont être entreprises, activités passionnantes pour les garçons et filles qui pris par l’envie de découverte quitte le lieu avec peine. Tout ce travail sera par ailleurs les prémices du futur et actuel musée archéologique de Saint-Elophe.

De nombreuses activités de plein air sont également proposées : escalade avec la création d’une école d’escalade à Rebeuville qui existe toujours, spéléologie, canoë, équitation, randonnées, veillées au coin du feu, …

 

Le camp ouvert de la Beugrée :

La Beugrée, une ferme sur un terrain de plusieurs hectares, au pied du massif de l’Ormont, sur le territoire de la commune de Pair et Grandrupt, avec une magnifique vue sur le massif des Hautes Vosges, propriété de l’association gérée par le groupe de Saint-Dié est reprise en gestion par le département EEDF des Vosges.

Le terrain ne disposait pas de l’accès à l’eau courante mais, en 1970, la commune réalise son adduction d’eau et la canalisation passe à 20 mètres de la ferme. C’est l’occasion de redynamiser ce terrain de camp et d’aventure.

Confrontés à une forte demande de vacances pour les 11-15 ans et la branche éclaireuses / éclaireurs (branche verte) recherchant des lieux d’accueil pour les camps d’été, la formule camp ouvert est lancée. Si le centre reste géré par le département des Vosges, c’est une partie de l’équipe régionale branche verte qui, lors du congrès régional de Vigy (Moselle) à l’automne 1970, décide se lancer dans l’aventure.

 

Le service vacances :

Riche de ces expériences, à l’automne 1977 – 1978, et en accord avec l’équipe départementale des Vosges qui éprouve le besoin de souffler un peu, l’équipe régionale organise et gère un service vacances qui, au-delà des deux structures qui viennent d’être évoquées, proposent des randonnées pédestres (le tour des Hautes Vosges à pied), des camps à bicyclette (l’Italie du Nord à bicyclette), des camps d’initiation à la spéléologie et à l’escalade dans le Jura, des expériences se séjours familiaux aux Tronches et à la Beugrée.

 

Des centres permanents :

Deux centres d’accueils permanents sont implantés dans le département des Vosges.

Le centre des Tronches, à proximité de Remiremont, géré par les EEDF de Moselle :

En 1957, à la recherche d’un centre permanent, l’équipe départementale des EDF de Moselle a tourné son regard vers les Vosges et le choix s’est rapidement porté sur une ferme abandonnée à une dizaine de kilomètres de Remiremont. Par un superbe site en pleine nature avec vue sur la vallée, sur les crêtes entre les Vosges et la Haute-Saône, avec un hectare et demi de terrain et la forêt à proximité, l’équipe a été de suite séduite et l’association a donc fait l’acquisition. Mais l’envers du décor s’est révélé moins séduisant et des travaux d’urgence ont été nécessaire pour protéger la construction.

Si les gros travaux ont été réalisés par des entreprises, les parents, amis et responsables ont été mobilisés. Le chantier a été mené pendant quatre années durant et l’inauguration s’est tenue officiellement le 9 septembre 1962 pour une riche aventure qui dure toujours, les Tronches étant aujourd’hui encore un centre d’accueil permanent.

Pendant de nombreuses années, une convention signée avec la Fédération des Œuvres Laïques (FOL) de Moselle a permis l’accueil de nombreux établissements scolaires tant de Lorraine que plus largement de toute la France.

Pendant les périodes de vacances scolaires les EEDF y organisait des stages et de nombreux séjours pour louveteaux et éclaireuses / éclaireurs.

Le centre de l’Ile Verte à Neufchâteau :

Comme nous l’avons indiqué précédemment, le groupe de Neufchâteau dispose, sur le plateau de la rue du Stand d’un magnifique terrain d’aventure sur lequel sont implantés un chalet et une grande salle d’activités.

Si le groupe de Neufchâteau y déploie ses activités de scoutisme, il y gère également un centre aéré ouvert à tous les enfants de la ville.

Le centre est aussi un lieu où l’on réalise de nombreux stages de formations.

Au regard de cette dynamique et avec le soutien de la Caisse d’Allocations Familiales, des Vosges, un centre d’accueil permanent est alors créé dans le début des années 1970.

Au-delà des activités déjà existantes, le centre gère notamment un restaurant scolaire pour les enfants de la ville de Neufchâteau.

Des difficultés de gestion vont cependant contraindre les EEDF dans le début des années 1980 à vendre le centre à la ville de Neufchâteau qui en fera une maison ouverte aux associations.

 

Une dynamique qui va être perturbée :

Deux évènements importants vont venir perturber cette dynamique que nous venons de décrire dans les lignes qui précèdent.

En 1970, l’école normale d’instituteurs de Mirecourt est fermée et regroupée avec l’école normale d’institutrices à Épinal. Ce transfert va mettre le groupe local en grande difficulté et il va peu à peu disparaître. Par ailleurs, la dynamique avec les élèves instituteurs est cassée et elle ne se renouvellera pas à l’école normale mixte d’Épinal. C’est une perte importante de militants pour le département des Vosges et ses différentes activités et des liens qui se distendent avec l’école.

Par ailleurs, dans le début des années 1970, sur le plan national, les EEDF subissent le contrecoup des évènements de mai 1968. Cette profonde ré-interrogation sur le Mouvement, ses missions et son devenir va aussi bousculer les militants et perturber la dynamique engagée.

                        

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