1945.01 et la suite : Dès janvier, "Le Chef" ouvre de nombreuses pistes...

Lun21Mai201214:53

1945.01 et la suite : Dès janvier, "Le Chef" ouvre de nombreuses pistes...

 À partir d'un rappel des "principes permanents", avec un peu de culture et une relance des activités des branches, y compris l'Extension : "C'est l'honneur des Éclaireurs de France d'être un Mouvement laïque, travaillant en milieu laïque, selon les principes laïques, en même temps que nous collaborons fraternellement avec d'autres Mouvements confessionnels au sein du Scoutisme Français"

La lecture des numéros du "Chef" parus trimestriellement en 1945 est particulièrement intéressante car elle démontre, dans le contexte d'un pays à reconstruire et à redéfinir, après près de cinq années difficiles, combien le Mouvement a été confronté à des questions souvent sans réponse, aussi bien dans son domaine propre - sa mission, ses objectifs, ses méthodes, ses moyens - que dans sa relation à une société en évolution.

Nous proposons aux visiteurs de parcourir une sélection d'articles de ces numéros successifs, grâce à la collection aimablement prêtée par Henri-Pierre Debord que nous remercions ici. Certains éléments présentés dans cette synthèse seront repris dans les articles suivants

Le sommaire du numéro de janvier est très fourni :

 

Deux pages sur les "principes permanents" rappellent l'article 1 des Statuts, les résolutions d'Auvillars et les conclusions de l'Oradou, textes qui expriment "l'esprit des Éclaireurs de France". L'article se termine sur une affirmation : "C'est l'honneur des Éclaireurs de France d'être un Mouvement laïque, travaillant en milieu laïque, selon les principes laïques, en même temps que nous collaborons fraternellement avec d'autres Mouvements confessionnels au sein du Scoutisme Français". Avec un prolongement un peu inattendu : "Lorsque, récemment, les Jeunesses Communistes nous demandèrent de recevoir chez nous leurs moins de 16 ans, nous n'avons trouvé ni étrange, ni dangereux d'accepter la conversation et de donner notre acceptation. Nous allons franchement vers tous les milieux, nous établissons l'union entre tous les Français sans pour cela supprimer leur diversité ni amoindrir leur personnalité"

La revue contient un encart "challenges et compétitions" pour la branche Éclaireurs, rédigé par René Tulpin qui insiste : "Dans ce modeste "supplément, nous n'avons rien voulu imposer. (...). Nous connaissons bien la situation de la branche Éclaireurs. Nous savons qu'elle a besoin actuellement d'effectifs et, partant, de technique. Nous avons donc voulu, à notre façon, nous mettre à son service." L'importance de la technique est également soulignée par un grand article de Pierre et Sven Sainderichin qui y voient la "nourriture essentielle de la troupe". L'article sur les phoques accompagne une proposition de sortie sur ce thème.


Quatre pages signées de Jean Libmann dans une rubrique "culture"  :

Libmann est également l'auteur d'un opuscule, présenté par ailleurs, édité par la Commission Route du Scoutisme Français sur les problèmes politiques. L'article propose d'abord un rappel historique - aboutissant à la création d'un "état d'esprit spécial, un esprit de classe", avant d'aborder la période qui commence et d'en tirer une conclusion :


 

À la suite des articles concernant les principes, la culture politique, l'animation et les techniques, le même numéro du Chef consacre huit pages à un article rédigé par Eugène Arnaud, Commissaire national adjoint, sur l'éducation à la pureté pour les Routiers :

À partir d'une définition - "Que faut-il entendre par pureté ? - les thèmes inventoriés sont successivement détaillés : condition de la dignité humaine, gage de volonté, de virilité, garantie de bonheur conjugal et une conclusion est proposée :


 

En conclusion de ce numéro du Chef, un article de Marcelle Lévy-Danon (dont la mari a été, l'année précédente, fusillé par les occupants) évoque le redémarrage des activités de la "branche" Extension, avec la création d'une équipe nationale "composée d'autant de cheftaines et chefs spécialisés que de catégories d'Extension". Cette annonce marque le début d'une longue période d'action auprès des Instituts spécialisés, et d'une réflexion sur l'adaptation de notre scoutisme aux différentes catégories d'handicapés :

Quelques mois après, le Chef de mai va donner une suite concrète à cette proposition d'action, avec un appel aux chefs qui ont, dans leurs unités, des jeunes "malades" et, surtout, avec la création du premier "stage d'information sur le scoutisme d'extension" qui sera suivi de nombreux autres :


 

Un article du Chef de novembre 1945, rédigé par Charles le Cœur, Commissaire de province au Maroc mais également ethnologue, ouvre une nouvelle réflexion et propose un certain nombre de solutions tenant comptes des caractéristiques « culturelles » de la jeunesse, française et nord-africaine, dans cette période.

 

À partir de la « position du problème », Le Cœur pose un ensemble de questions :

-   entre quels âges s’établit cette phase d’initiation virile ?

-   y a-t-il lieu de prévoir pour elle une organisation particulière ?

-   si oui, sur quels principes doit-elle reposer ?

-   comment résoudre les difficultés nées de la complexité de nos civilisations ?

-   comment choisir les dirigeants de l’organisation ? quels rapports avec l’université et l’Armée ?

Les réponses aux premières interrogations sont assez rapides : le besoin se situe entre 16 et 20 ans, une réponse différente de celle apportée pour les âges précédents est nécessaire, de même qu’une organisation adaptée alors que les existantes (scoutisme, patronages) sont suffisantes pour les plus jeunes.

L’essentiel de l’argumentation concerne les difficultés d’ordre « culturel » car elles intègrent, à la fois, les différences de classe sociale et les différences de cultures. En ce qui concerne les différences de classe sociale, Le Cœur constate que « l’Action Catholique a été peu à peu amenée à spécialiser ses mouvements de jeunesse en Jeunesse Ouvrière Catholique,  Jeunesse Étudiante Catholique, Jeunesse Agricole Catholique »…

En ce qui concerne les cultures, le constat a des conséquences en ce qui concerne le vocabulaire :  « Le malheur de la France est qu’elle possède deux vocabulaires collectifs et deux traditions : le vocabulaire religieux (…) et le vocabulaire républicain (…) » Il est donc nécessaire de définir une approche commune permettant une réelle coexistence :

 

Une dernière partie de l’article aborde, assez sommairement, les problèmes posés, pour cette tranche d’âge, par l’éducation « sexuelle » et les relations avec les filles :

-   « ne pas s’opposer, dans la conversation, à la crudité de langage en matière sexuelle, et, à l’occasion, en donner l’exemple (…)

-   en revanche, il faut absolument interdire, non seulement toute fréquentation de mauvais lieu, mais toute liaison pendant la durée du camp (…)

-   enfin, il serait bon d’organiser, à chaque période, une rencontre courtoise avec des jeunes filles honnêtes (…) »

Imprimer